Non au projet de loi 70, Oui à de vraies mesures de lutte à la pauvreté
Profitant de la reprise de la Commission parlementaire sur le projet de loi 70, la Coalition Objectif Dignité veut rappeler au ministre François Blais que « 623$, ça ne se coupe pas ! ». La Coalition exhorte le ministre à retirer son projet de réforme de l’aide sociale et à hausser les montants des prestations afin que les prestataires puissent répondre à l’ensemble de leurs besoins de base.
Le projet de loi 70 veut obliger les personnes qui font une première demande d’aide sociale à participer au nouveau programme Objectif Emploi, sous peine de voir leur chèque d’aide sociale amputé. Depuis son dépôt le 10 novembre 2015, de nombreuses critiques ont été émises sur ce projet de loi.
« On ne peut pas couper d’un tiers une prestation déjà insuffisante en pensant que ça va aider les personnes. Tout le monde sait que le montant de base actuel ne permet même pas de se loger ni de se nourrir correctement. M. Blais va-t-il enfin entendre raison et reconnaître les droits des prestataires ? » s’insurge Nathalie Rech, porte-parole de la Coalition Objectif Dignité et de la Coalition pour l’accessibilité aux services des centres locaux d’emploi.
«Près de 300 professeur.e.s et chargé.e.s de cours, autant d’organismes communautaires, des éditorialistes, la Protectrice du citoyen, le Barreau du Québec tout comme la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse ont déjà dénoncé ce projet de loi. Cette réforme représente une grave attaque aux droits à la sécurité et à la dignité, entre autres, des personnes les plus démunies », déplore Christian Nadeau, président de la Ligue des droits et libertés et professeur de philosophie à l’Université de Montréal.
L’aspect coercitif des mesures proposées pénalisera durement de nombreuses personnes. « Dans notre réseau, on sait que plusieurs personnes qui survivent avec l’aide sociale ont à prendre soin de leur santé ou à régler des situations difficiles avant de chercher du travail. Nos organismes communautaires accompagnent des femmes victimes de violence, des personnes toxicomanes, des personnes qui viennent de recevoir des diagnostics qui changent leur vie – pensons au VIH/SIDA –, des proches aidants qui assistent des membres de leur famille au quotidien. Ces personnes ne seront pas toujours prêtes à chercher du travail au moment où des fonctionnaires leur ordonneront de le faire», remarque Alexandra Pierre de la Table des regroupements provinciaux d’organismes communautaires et bénévoles.
«C’est pour cela que nous demandons que l’aide sociale demeure non conditionnelle à des démarches de retour à l’emploi. Par contre, nous souhaitons que tous ceux et celles qui veulent s’engager dans un parcours de réinsertion professionnelle puissent le faire grâce à des mesures adaptées et en nombre suffisant. Et c’est loin d’être le cas en ce moment», poursuit Mme Pierre.
En plus des jeunes, qui sont implicitement visé.e.s par ce projet de loi, les personnes immigrantes sont aussi concernées. Malgré leur haut niveau de formation, nombre de personnes immigrantes ne trouvent pas d’emplois correspondant à leurs qualifications. Un meilleur système de reconnaissance des diplômes ou des politiques contre le racisme en milieu de travail aideraient davantage les personnes immigrantes que de les obliger à suivre des formations pour combler des emplois précaires et mal payés. Pour les personnes immigrantes, comme pour les autres prestataires, un accompagnement plus spécifique et personnalisé est quasi impossible à obtenir à l’heure actuelle.
Cela s’explique d’abord par un manque de moyens, mais aussi parce que, comme le constate Nathalie Rech, « Les ministres qui se succèdent voient l’aide sociale comme une politique d’emploi, qui sert les intérêts du marché du travail. Il faut rappeler que l’aide sociale est une aide de dernier recours pour soutenir les personnes qui vivent des moments difficiles ».
La réalité des personnes à l’aide sociale est multiple et complexe. Mais des moyens concrets existent pour leur permettre de sortir de l’aide sociale et de la pauvreté extrême : rehausser les prestations, leur permettre de suivre des formations de leur choix, sans égard aux besoins à court terme du marché du travail, offrir un accompagnement individualisé exempt de surveillance et de soupçons. Parce que ces solutions existent et que le ministre Blais doit cesser d’ignorer les critiques, les études et les témoignages qui lui sont présentés depuis des mois, la Coalition Objectif Dignité exige le retrait du projet de loi 70.
Plus de 250 groupes syndicaux, féministes et communautaires ont signé la déclaration d’appui à la Coalition Objectif Dignité, laquelle rassemble une vingtaine de regroupements nationaux communautaires qui demandent notamment le retrait du projet de loi 70.