La faim, ce fait divers québécois
Il y a exactement deux semaines, ce titre dans un média régional: « Les aînés gaspésiens ont faim ». Cette nouvelle s’inscrit dans une tendance. De plus en plus de personnes ont recours aux banques alimentaires : des personnes aînées, mais aussi 150 000 enfants, des personnes qui ont des revenus d’emploi, d’autres qui sont à l’aide sociale, etc.
(Lettre ouverte de Virginie Larivière, porte-parole du Collectif pour un Québec sans pauvreté, publiée dans Le Droit et dans La Tribune)
En moins d’une décennie, le nombre de personnes qui ont eu recours aux services des banques alimentaires a augmenté de près de 34%. Du coup, ces dernières ont de plus en plus de mal à répondre aux besoins. L’année dernière, dans certaines régions, les demandes d’aide alimentaire ont explosé de 300%, forçant l’annulation des paniers de Noël.
Des initiatives comme La grande guignolée des médias donnent certainement un coup de main pour apaiser la faim de milliers de personnes au Québec. Mais elles ne suffisent pas à cacher le problème de fond: le recours aux banques alimentaires est en train de se « normaliser ».
La faim serait-elle devenue un fait divers au Québec? Pourquoi le réseau des Banques alimentaires du Québec est-il obligé de faire un rappel aussi simple chaque année dans son Bilan-Faim : « Manger ne devrait pas être un luxe, c’est un droit fondamental.» ?
Devant cette situation, nous sommes en droit de nous attendre à ce que le gouvernement assume ses responsabilités. Malheureusement, force est de constater que la lutte contre la pauvreté est loin d’être une de ses priorités. Nous lui reprochons son inaction, et encore plus le fait qu’il vienne empirer le problème au lieu de chercher à y remédier.
Par exemple, pourquoi vient-il de réduire les impôts d’un milliard $ (au seul profit des personnes qui ont les moyens d’en payer), se privant ainsi d’une source de revenu récurrente? Pourquoi refuse-t-il de réinvestir les milliards qu’il a coupés dans les services publics, ce qui a pénalisé particulièrement les personnes les plus mal prises?
Pourquoi menace-t-il de couper les prestations des personnes qui feront une première demande d’aide sociale? Pourquoi refuse-t-il d’augmenter le salaire minimum de façon substantielle pour permettre aux travailleuses et aux travailleurs de sortir de la pauvreté?
À l’occasion de La grande guignolée des médias, nous saluons la générosité des Québécoises et des Québécois. Oui, nous devons aider les personnes qui en ont besoin, mais ne laissons pas si facilement le gouvernement se décharger de sa responsabilité de lutter contre la pauvreté (et contre la faim!). La magie de Noël et les baisses d’impôt ne doivent pas calmer notre indignation.