QUÉBEC, le 23 mars 2007 – Au cours de cette dernière semaine de campagne électorale, deux sujets sont venus susciter de sérieuses craintes au sein du Collectif pour un Québec sans pauvreté. Le premier concerne la volonté d’un parti de sortir 25 000 personnes de l’aide sociale. Le peu de détails sur le sujet et les déclarations contradictoires font craindre que l’on veuille davantage lutter contre les «pauvres» que contre la pauvreté. Le deuxième est la promesse d’un autre parti d’utiliser pour des baisses d’impôt la totalité des argents non rattachés à des programmes spécifiques, promis au Québec dans le dernier budget fédéral. Cette promesse nous priverait des moyens attendus depuis longtemps pour lutter contre la pauvreté. Ces deux orientations menacent l’atteinte de l’objectif de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l’exclusion sociale qui est de faire du Québec, d’ici 2013, l’une des nations industrialisée où il y a le moins de personnes pauvres.
Le Collectif souhaite depuis longtemps que toutes les personnes qui veulent retourner sur le marché de l’emploi ou aux études puissent avoir accès à des mesures. Déjà amputés au cours des années ‘90, les fonds du Québec consacrés à l’aide à l’emploi ont diminué de 16.6% depuis 2000. Les personnes à l’aide sociale jugées aptes au travail sont de plus en plus éloignées du marché du travail. En effet leurs conditions de vie, qui ne permettent pas de couvrir leurs besoins essentiels, ont contribué à détériorer leur santé et à les éloigner davantage du marché de l’emploi. En conséquence, les mesures dont elles auraient besoin sont des mesures à long terme, donc plus coûteuses. L’ADQ prétend remettre les personnes au travail mais ne prévoit pas de budget supplémentaire pour la formation ni d’amélioration des conditions de travail au bas de l’échelle. Au contraire, il prévoit même faire des économies de 175 M$ dans le budget d’aide sociale! Les coupures de budget, la volonté du chef de parti de l’ADQ de serrer la vis aux prestataires d’aide sociale et l’absence d’engagement concernant la lutte à la pauvreté font craindre le pire sur les intentions réelles de ce parti.
À propos des baisses d’impôts, les organismes luttant contre la pauvreté se sont vu répondre à plusieurs reprises par les gouvernements successifs qu’ils auraient voulu en faire plus mais qu’ils n’en avaient pas les moyens, entre autres parce qu’une partie de l’argent est au fédéral. Or, le récent budget fédéral promet au Québec 700 M$ d’argent neuf via la péréquation, argent qui pourrait être affecté aux programmes choisis par le Québec, dont la lutte à la pauvreté. Mais dès le lendemain de cette annonce, le chef du Parti libéral engageait toute cette marge de manœuvre dans des réductions d’impôt. Rappelons que depuis 2000, les deux gouvernements péquiste et libéral ont consenti d’importantes baisses d’impôts, notamment celles des budgets 2000-2001 et 2001-2002 qui à elles seules ont privé le Québec de plus de 3.5 G$ annuellement. En plus d’enlever des moyens d’action aux gouvernements, ces baisses d’impôt ont creusé les écarts entre les riches et les pauvres.
Avec les 700 M$ du fédéral, on pourrait prendre de nombreuses mesures urgentes, qui permettraient de respecter les droits sociaux reconnus dans les chartes et traités internationaux : l’indexation annuelle et complète des prestations d’aide sociale, l’exemption totale des pensions alimentaires du calcul du revenu des personnes assistées sociales, la gratuité des médicaments pour toutes les personnes dont le revenu est inférieur à 12 000 $ par année, le rétablissement des budgets à la formation et à l’insertion au niveau de 1997, l’abolition de la coupure de 100 $ pour solidarité familiale (clause Tanguy), pour un total de 450 M$. Il en resterait pour de nombreux autres chantiers : le logement social, l’aide aux étudiants, l’amélioration des barèmes à l’aide sociale. Le Collectif considère ainsi que les sommes promises pour les réductions d’impôt pourraient être mieux investies, pour un Québec riche de tout son monde.
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