Mise à jour économique, ou l’art de la volte-face et de l’embrouille
Le gouvernement du Québec n’a prévu dans sa mise à jour économique aucun soutien financier supplémentaire pour les personnes en situation de pauvreté, lesquelles sont pourtant les plus durement frappées par la hausse marquée du coût de la vie. Pour comble d’insulte, il cherche à faire passer le dispositif automatique de l’indexation annuelle pour une mesure d’aide.
L’indexation n’est pas une mesure d’aide
« Pas plus tard que la semaine dernière, le premier ministre a de nouveau laissé entendre que la mise à jour économique comprendrait des mesures visant à aider les personnes ’’plus vulnérables’’ à faire face à la hausse du coût de la vie, rappelle le porte-parole du Collectif pour un Québec sans pauvreté, Serge Petitclerc. Plusieurs personnes en situation de pauvreté s’accrochaient à cet engagement. Mais encore une fois, le gouvernement les a laissées tomber. Le Collectif s’indigne de cette volte-face.
« Aujourd’hui, le ministre des Finances nous a présenté l’indexation des crédits d’impôt et des différentes prestations comme un moyen d’aider les gens à faire face à la hausse du coût de la vie. Mais faut-il vraiment lui rappeler qu’il ne s’agit pas d’une mesure d’aide? Ce n’est qu’une obligation légale visant à assurer que les aides de l’État ne perdent pas de valeur. Cela permet à peine de préserver le pouvoir d’achat, sans toutefois l’améliorer…
« Avec un taux d’indexation de 5,08 %, les prestations d’Aide sociale augmenteront de 37 $ par mois à compter du 1er janvier. Rien pour améliorer le sort de personnes qui n’arrivent à couvrir que la moitié de leurs besoins de base. Le crédit d’impôt pour solidarité, pour sa part, augmentera de 59 $ par année, l’équivalent de cinq maigres dollars par mois… et seulement à compter du mois de juillet.
« Nous avons de la difficulté à comprendre cette réticence du gouvernement à aider les personnes qui en ont le plus besoin, poursuit Serge Petitclerc. Comment croire qu’il ne peut pas aider des personnes en situation de pauvreté, qui en arrachent plus que jamais à cause de la hausse du coût de la vie, alors qu’il vient de consentir des baisses d’impôt qui profitent avant tout aux personnes les mieux nanties?
« À cet égard, les données du ministère des Finances sont révélatrices! Ce sont les personnes les mieux nanties qui profiteront le plus de l’effet combiné de l’indexation et de la baisse d’impôt sur le revenu. Ainsi, en 2024, une personne seule gagnant 20 000 $ par année aura 165 $ de plus dans ses poches, celle gagnant 60 000 $ en aura 842 $ de plus et celle gagnant 150 000 $ en aura 1 476 $ de plus. (Voir tableau ci-dessous.) Est-ce vraiment ce que le premier ministre avait en tête quand il disait vouloir aider les personnes plus ’’vulnérables’’ à faire face à la hausse du coût de la vie?
À quand des mesures structurantes?
« Vendredi dernier, en conférence de presse, le Collectif a rappelé ses attentes au ministre des Finances en vue de la mise à jour économique. Nous réclamions un meilleur soutien au revenu pour les personnes en situation de pauvreté, qui pourrait passer par la hausse des prestations d’assistance sociale, du salaire minimum, du crédit d’impôt pour solidarité, de même que par l’élargissement à l’ensemble des aîné.es du crédit d’impôt pour soutien aux aîné.es, auquel seuls les gens de 70 ans et plus ont actuellement droit. Force est de constater que notre message n’a pas été entendu, se désole Serge Petitclerc
« Bien sûr, il faut saluer le financement accru des banques alimentaires et des mesures d’urgence pour les personnes en situation d’itinérance. Cela demeure nécessaire pour freiner l’hémorragie. Mais ce n’est pas cela qui fera reculer la pauvreté au Québec et, surtout, ce n’est pas cela qui réussira à masquer l’inaction du gouvernement en la matière.
« En terminant, soulignons que le Collectif se réjouit des 900 millions que le gouvernement du Québec ajoutera aux 900 millions du gouvernement du Canada pour la construction de logements sociaux et abordables. Pour que cela représente vraiment un pas dans la bonne direction, il faudrait que cet argent aille en priorité à la construction de logements sociaux, pour répondre d’abord aux besoins les plus criants. »