Bonjour!
L’actualité des derniers jours montre bien qu’il y a d’autres solutions que la guerre au problème iraquien. Elle montre aussi que la guerre que veut malgré tout le gouvernement des Etats-Unis est une guerre fabriquée.
La guerre à laquelle le gouvernement des Etats-Unis appelle tout le monde, ce n’est pas une guerre pour la sécurité du peuple américain contre le terrorisme. Comme l’a dit Robert Bowman, un évêque américain, dans une lettre au président des Etats-Unis en 1998, la vérité, c’est que le peuple américain est terrorisé parce que son gouvernement est haï et que son gouvernement est haï parce qu’il a fait des choses haïssables depuis plusieurs générations en empêchant d’autres peuples de réaliser leurs droits fondamentaux, dont le droit au développement, ceci au nom de ses propres intérêts économiques.
L’actualité des derniers jours montre aussi que le manque de liberté politique du Canada est lié à son manque de liberté économique. La principale question qu’on a vue se poser cette semaine pour le Canada, c’est : est-ce qu’on peut faire autrement que de suivre Bush compte tenu que les Etats-Unis sont notre principal partenaire économique? Je la reposerais autrement : est-ce qu’on doit se faire imposer un ennemi et une guerre au nom des relations économiques qu’on entretient avec un voisin?
On est connus au Collectif pour avoir introduit des concepts pour casser le monopole du sacro-saint Produit Intérieur Brut ou PIB. On a introduit le Produit intérieur doux, la Dépense intérieure dure et les dollars vitaux. Je vous propose un autre concept aujourd’hui : le Produit extérieur brutal. On pourrait définir le Produit extérieur brutal comme étant l’argent qu’on fait en le prenant sur la vie des autres dans un autre pays. Ce que demande le président des Etats-Unis en ce moment, c’est de générer du produit extérieur brutal pour protéger les intérêts économiques et politiques du capital américain au Moyen-Orient. Le Canada est pris là-dedans non seulement parce qu’il a des relations économiques avec les Etats-Unis, mais parce que sa propre économie a une part courante de Produit extérieur brutal : à chaque fois que l’industrie canadienne produit de l’armement, par exemple, ou encore à chaque fois on achète un confort ici sur le dos du travail d’un enfant, de la pollution d’un village, de la destruction d’un environnement ailleurs.
Aucune fortune ne justifie qu’on prenne pour la construire ne serait-ce qu’une seule livre de chair sur la vie d’autrui. Il me semble que notre marche n’a de sens que si on accepte de se demander comment agir pour éliminer le Produit extérieur brutal de nos relations économiques individuelles et collectives.
Ceci dit, la question immédiate qui se pose pour moi aujourd’hui en tant que citoyenne du Canada, c’est : au-delà d’une marche, comment puis-je retirer mon consentement à cette guerre fabriquée à laquelle je m’objecte? Y a-t-il une voie pour une solidarité efficace contre cette guerre? Quels sont les moyens? Il doit y avoir moyen de trouver des moyens qui aient un véritable impact. Je vous suggère qu’on profite de cette marche au frette pour y penser.
On disait au Collectif cette semaine que les reculs sont toujours possibles et qu’il peut suffire d’une personne au mauvais endroit, au mauvais moment pour les provoquer. C’est le rôle que joue en ce moment le président des Etats-Unis. Le problème c’est que pour contrer une telle situation, ça prend beaucoup de monde dans beaucoup de lieux pendant un bon bout de temps. Souhaitons-nous de trouver comment.
Vivian Labrie, Collectif pour une loi sur l’élimination de la pauvreté, 15 février 2003