Québec, le 28 mars 2001. Suite à une rencontre porteuse d'ouvertures hier avec le premier ministre Bernard Landry et ses collègues chargé-e-s de concrétiser la priorité de lutte à la pauvreté, Jean Rochon et Nicole Léger, le Collectif pour une loi sur l'élimination de la pauvreté et son réseau évalueront demain, plate-forme budgétaire en main, la volonté politique du nouveau cabinet à travers les mesures qui seront annoncées. Pas moins de 17 écoutes collectives du budget du Québec auront lieu dans autant de villes. De plus, un groupe d'une douzaine de personnes, dont plusieurs en situation de pauvreté, effectuera le même travail à l'intérieur du huis-clos du budget à Québec.
Au cours des dernières semaines, le Collectif a mené une tournée systématique des régions du Québec pour faire connaître sa plate-forme budgétaire et pour former les citoyennes et les citoyens à analyser le budget du Québec en fonction de son impact sur la réduction de la pauvreté et des écarts. Les résultats sont là. Dans les 28 villes visitées, des gens seront à l'écoute.
Dans au moins 17 villes, il s'agira d'une écoute collective. À Arvida, Hull, Laurier-Station, Laval, Montréal, Québec, Rimouski, Rouyn, St-Hubert, St-Hyacinthe, Sherbrooke, Trois-Rivières, Victoriaville, les citoyennes et citoyens sont invités à venir écouter et analyser en direct le discours de la ministre des Finances. À Joliette, Plessisville, Rivière-du-Loup, St-Jérôme, l'écoute aura lieu en différé dans les heures ou les jours suivants.
Comment le Collectif évaluera-t-il le budget Marois?
On sait que le Collectif réclame une loi cadre sur l'élimination de la pauvreté et une série de mesures dès maintenant. Hier lors de la rencontre avec le premier ministre et ses collègues, des pas ont été fait en direction de la loi cadre.
Le Collectif a noté la volonté gouvernementale de faire de la lutte contre la pauvreté et l'exclusion une priorité. Il a fait valoir l'importance de placer un tel effort sur la bonne case départ. Si stratégie il doit y avoir, il faut la fonder sur les droits, l'encadrer par une loi et lui donner un caractère de pérennité.
De son côté, Bernard Landry a précisé que son gouvernement n'est pas réfractaire au principe d'une loi cadre telle que mise de l'avant par le Collectif. Tout en notant que plusieurs points seraient à discuter, le premier ministre a reconnu qu'il valait la peine d'en parler. Il est d'accord pour aller plus loin avec le Collectif dans un travail de déblayage sur la question. Il s'est dit prêt à un plan de dialogue structuré.
Le Collectif a mis quatre conditions à ce dialogue : 1. que le gouvernement envisage une stratégie qui soit globale et qui traverse l'ensemble de l'action gouvernementale, 2. qu'il soit prêt à y consacrer les ressources nécessaires, 3. qu'on puisse percevoir des signes tangibles de cette volonté politique dans le budget du 29 mars 2001, 4. que le gouvernement n'utilise pas ce dialogue comme prétexte pour paralyser des actions qui sont urgentes et doivent être entreprises sans tarder.
Ces conditions ont été acceptées et il a été entendu de part et d'autre qu'une rencontre de travail suivrait prochainement pour établir la façon dont ces discussions auront lieu.
"C'est un changement de ton, a commenté Vivian Labrie, porte-parole du Collectif. Le gouvernement révise son attitude précédente d'évitement de notre travail. Il ne rejette plus d'emblée l'idée d'une loi cadre. Nos trois interlocuteurs ont confirmé leur ouverture à examiner l'idée d'une loi cadre à son mérite et à faire des pas avec nous dans cette direction. Mais nous verrons lors du budget de jeudi d'où nous partons et nous prendrons la mesure du coup de barre à donner pour se rendre à la case départ. En plus d'un changement de ton, c'est un changement d'approche qu'il faut. "
Mme Labrie rappelle que les trois derniers budgets ont systématiquement augmenté les écarts entre les plus riches et les plus pauvres dans la société et considère qu'il s'agit là de tout un courant à inverser. Elle rappelle que le gouvernement connaît la plate-forme budgétaire du Collectif, qui exprime ce qui est de l'ordre de l'urgence et de la simple couverture des besoins essentiels de tous et toutes.
Le Collectif note que la journée du 29 mars sera une journée de fin de mois, où des milliers de personnes au Québec n'ont plus un dollar en poche. Dans quelle mesure leurs conditions de vie seront-elles améliorées au lendemain de ce budget? Sentiront-elles la solidarité respectueuse de leur dignité qui doit être le début de la lutte à l'exclusion ou reconnaîtront-elles à nouveau le double message des fausses bonnes nouvelles auquel elles sont habituées?
Cette année le réseau du Collectif sera bien équipé pour en faire l'évaluation grâce à la trousse d'animation et aux outils d'analyse qui ont été largement diffusés et expliqués depuis janvier. Ce n'est pas après, mais avant le budget qu'on se sera demandé : le budget du Québec de cette année augmentera-t-il ou réduira-t-il les écarts entre les plus riches et les plus pauvres?