Québec, le 1er novembre 2001. Après analyse du budget Marois, le Collectif pour une loi sur l'élimination de la pauvreté constate qu'il s'agit d'un premier budget depuis cinq ans qui ne contribue pas à creuser l'écart entre les plus pauvres et les mieux nantis. La ministre emprunte une voie intéressante en annonçant des mesures visant à stimuler la consommation qui sont majoritairement ciblées vers la bas de l'échelle. Mais elle reste timide dans ses avancées. La plupart des mesures sont non récurrentes et plusieurs mesures urgentes qu'il lui aurait été facile de mettre en place, malgré le contexte incertain de l'économie, sont laissées en plan.
Le Collectif est par ailleurs étonné de ne voir dans le présent budget aucune réserve pour la stratégie globale de lutte à la pauvreté prévue pour 2002. Le gouvernement aurait-il décidé de mettre de côté son obsession de lutte à la pauvreté?
Les bons coups
La meilleure nouvelle du budget pour les personnes les plus pauvres est sans contredit l'investissement 362 M $ dans le logement social, une mesure qui permet d'améliorer la sécurité au bas de l'échelle tout en créant des emplois.
L'indexation annoncée des prestations de la sécurité du revenu est également une bonne nouvelle. Néanmoins le Collectif rappelle que l'indexation devrait être automatique afin d'assurer l'appauvrissement zéro de tout-e-s les prestataires. De plus, les barèmes actuels sont trop bas puisqu'ils ne couvrent pas les besoins essentiels, selon les évaluations mêmes du Ministère de la Solidarité sociale et ils sont sujets à des pénalités qui ne sont pas levées, en particulier la coupure pour partage de logement, que le gouvernement s'est pourtant engager à éliminer avant la fin de son mandat.
En accordant en décembre 2001 un bon de 100$ à la consommation aux personnes recevant le crédit d'impôt pour remboursement de TVQ, le gouvernement se rend à l'argument du Collectif qu'une marmite se chauffe par le bas et qu'un dollar vital est un dollar local et il masse son investissement dans le bas de l'échelle. Toutefois il s'agit d'une mesure non récurrente qui n'améliorera pas le revenu des personnes les plus pauvres à plus long terme.
On peut remarquer également le choix méthodologique de présenter l'impact des mesures sur tous les niveaux de revenus, y compris ceux des plus pauvres.
Des vies encore en attente
Malgré ces points positifs, le présent budget aurait pu faire plus pour assurer la sécurité économique des moins bien nantis de la société québécoise.
Ainsi, la ministre n'a pas complété l'abolition de la coupure pour partage de logement (54$/mois), une mesure qui aurait couté 51 M $. Dans le contexte actuel de crise du logement, le Collectif comprend mal cette ommission qui a un effet négatif sur le nombre de logements disponibles sur le marché locatif. De plus, le gouvernement s'était engagé à abolir la coupure lors du Sommet du Québec et de la Jeunesse, promesse qu'il n'a rempli que partiellement.
Rien non plus dans le budget à propos de la gratuité des médicaments pour les prestataires de la sécurité du revenu et les personnes qui recoivent le supplément de revenu garanti. Aucune diminution de coût n'est même à l'ordre du jour, malgré une résolution en ce sens adoptée le 18 octobre à l'Assemblée nationale. Les personnes les plus pauvres auront encore trop souvent à faire le choix entre manger ou acheter des médicaments, une situation qui nuit à leur bien-être et qui contribue à l'augmentation des coûts de Santé. La gratuité aurait coûté 60 M $.
Aucune réserve pour la stratégie de lutte à la pauvreté prévue pour 2002
L'absence de réserve pour la priorité de lutte à la pauvreté et la stratégie à venir est inquiétante. L'élaboration de cette stratégie est bien mal partie. Déjà le Collectif constate que le processus de consultation en cours tente de contourner son travail en ne permettant pas un véritable débat public sur les perspectives qu'il porte. La crédibilité du gouvernement sur la question vient de chuter avec cette omission incompréhensible. Tous les beaux discours sur la lutte à la pauvreté ne servent à rien sans une enveloppe budgétaire.
Il faudra voir les effets à long terme de ce budget qui prévoit des mesures ayant des impacts à plusieurs niveaux à la fois. Le Collectif s'inquiète en particulier de voir augmenter encore une fois les exemptions fiscales aux entreprises avec les effets négatifs qu'auront de telles mesures sur la solidarité fiscale des entreprises. De mêmes les écarts importants créés entre riches et pauvres au cours des derniers budgets ne sont pas corrigés.