50 ans d’aide sociale: Les parlementaires doivent viser la pleine réalisation du droit
Aujourd’hui, l’Assemblée nationale a adopté à l’unanimité une motion soulignant « qu’il y a 50 ans, le gouvernement du Québec adoptait la Loi sur l’aide sociale afin d’introduire un droit à l’assistance sociale ». Le Collectif pour un Québec sans pauvreté et le Front commun des personnes assistées sociales saluent ce geste et invitent les parlementaires à tout mettre en œuvre pour lever les multiples restrictions au droit à l’aide sociale et pour permettre aux personnes assistées sociales d’au moins couvrir leurs besoins de base.
De multiples restrictions
« De multiples restrictions minent le droit à l’aide sociale, lance le porte-parole du Front commun des personnes assistées sociales du Québec, M. Guillaume Grenon. Pour avoir droit à l’aide sociale, il faut avoir épuisé tous ses avoirs et ses autres recours. Il faut avoir touché le fond. Et une fois accepté dans le programme, on doit se plier à une série de conditions. »
« Pensons par exemple à l’interdiction de sortir du Québec pour plus de sept jours consécutifs, à la réduction de la prestation pour vie maritale, à la limitation des gains de travail permis à 200 $ par mois pour une personne seule ou encore au détournement des indemnisations pour les personnes victimes d’actes criminels, explique Guillaume Grenon. Ce sont des mesures qui agissent comme des trappes à la pauvreté. On voudrait ôter toute chance aux personnes assistées sociales de voir la lumière au bout du tunnel qu’on ne ferait pas autrement! »
Des prestations insuffisantes
« Une autre lacune fondamentale du système d’aide sociale est qu’il maintient les personnes dans la misère depuis 50 ans, poursuit le porte-parole du Collectif pour un Québec sans pauvreté, M. Serge Petitclerc. La prestation de base pour une personne seule était de 101 $ en 1970, soit 674 $ en dollars constants de 2019. En comparaison, une personne assistée sociale touche actuellement une prestation de 644$. Si on inclut les crédits d’impôt et l’ajustement à la prestation, elle perçoit un revenu mensuel de 776 $ par mois. Cela lui permet de couvrir à peine 50 % des besoins de base selon la Mesure du panier de consommation (MPC). »
Toujours selon Serge Petitclerc, « l’insuffisance chronique des prestations est due en grande partie à des préjugés persistants à l’égard des personnes assistées sociales. Des préjugés souvent portés par la classe politique elle-même et selon lesquels elles seraient toutes paresseuses, fraudeuses, responsables de leur sort ou susceptibles de se complaire dans l’aide sociale si elles sont trop bien traitées. »
Deux personnes assistées sociales témoignent
Extrait du témoignage de Monique Toutant de l’Association pour la défense des droits sociaux Québec métropolitain (ADDSQM) :
« Vivre d’aide sociale, c’est être victime de préjugés, être contrôlé par son agent et devoir rendre des comptes. Je me sens toujours obligée de me justifier face à tout le monde, encore plus face au ministère. Tout doit être justifié pour améliorer son sort. Comme la reconnaissance de mes contraintes à l’emploi. Après un dur combat de 3 ans, j’ai fini par l’obtenir. J’en ai rempli des formulaires! […]
« La loi d’aide sociale a vraiment besoin d’être corrigée, améliorée. Mais attention, la première chose est de mettre fin aux catégories et donner une prestation juste pour tout le monde. On doit vraiment envisager au Québec un Revenu social universel garanti, pour tous et toutes. »
Extrait du témoignage de Linda Laprise de l’Association pour la défense des droits sociaux Québec métropolitain (ADDSQM) :
« Je viens vous partager une réalité que plusieurs d’entre nous vivons au quotidien. Le gouvernement dit vouloir aider les plus démunies. Non, je ne suis pas démunie. Je parle, je pense, j’agis. Je suis pauvre et je le vis à tous les jours. Je m’accepte dans ma pauvreté.
« Les programmes d’aide à l’emploi sont en nombre insuffisant et ne permettent pas d’intégrer l’emploi à long terme. Les mesures, j’y crois plus. Je les ai toutes faites, j’ai passé par toutes les formes et aujourd’hui je me retrouve aussi pauvre qu’avant. »
En conclusion
Il y a 50 ans, l’introduction du droit à l’aide sociale a représenté une avancée importante pour la société québécoise. Selon le Collectif pour un Québec sans pauvreté et le Front commun des personnes assistées sociales du Québec, ce droit n’a jamais été pleinement réalisé. Les parlementaires ont la responsabilité de s’attaquer à cette tâche, en levant les restrictions qui briment les personnes assistées sociales et en leur assurant un revenu décent.
Texte complet de la motion déposée aujourd’hui par le ministre du Travail, de l’Emploi de la Solidarité sociale, M. Jean Boulet :
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Que l’Assemblée nationale souligne qu’il y a 50 ans, le gouvernement du Québec adoptait la Loi sur l’aide sociale afin d’introduire un droit à l’assistance sociale;
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Qu’elle reconnaisse l’importance de cette loi non seulement pour les personnes dans le besoin, mais pour l’ensemble de la société;
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Qu’elle s’assure de l’évolution de cette loi au fil du temps, de sorte que l’inclusion économique et la participation sociale des personnes et des familles à faible revenu se poursuivent.
Témoignages complets des deux militantes de l’Association pour la défense des droits sociaux Québec métropolitain (ADDSQM)
Témoignage de Monique Toutant
Aujourd’hui pour les 50 ans de la loi, je viens vous transmettre mon indignation face à ce qu’est devenue l’aide sociale au Québec.
Je suis toujours impressionnée de voir l’augmentation de la pauvreté, la fréquentation des banques alimentaires en témoigne.
Vivre d’aide sociale, c’est être victime de préjugés, être contrôlé par son agent et devoir rendre des comptes. Je me sens toujours obligée de me justifier face à tout le monde, encore plus face au ministère.
Tout doit être justifié pour améliorer son sort. Comme la reconnaissance de mes contraintes à l’emploi. Après un dur combat de 3 ans, j’ai fini par l’obtenir. J’en ai rempli des formulaires! Mais cette victoire me laisse un goût amer, quand je pense aux personnes qui ne sont pas au programme Solidarité sociale, elles sont incapables de couvrir leurs besoins. Je tiens à souligner que lorsqu’on est sans revenu, nous avons tous les mêmes besoins. Pourquoi pas le même chèque?
Depuis l’instauration de la 1re loi, des catégories sont apparues au fil des réformes. Ces distinctions importantes affectent au quotidien les personnes. On est passé de l’aide de dernier recours, sans conditions, à une aide conditionnelle. Les gouvernements ont fait preuve de beaucoup d’imagination pour inventer des règles restreignant le droit à l’aide sociale et en augmenter le contrôle sur les personnes.
Au fil des ans, j’ai été témoin de quelques gains, après parfois de longues luttes. Même si ça semble des gains, ils ne le sont que partiellement. Comme le détournement de la pension alimentaire versée au bénéfice des enfants, l’assurance médicament, un montant un peu plus élevé du Crédit d’impôt de solidarité, mais qui est aussi utilisé pour rembourser une dette au ministère, on a mis fin au partage de logement par contre on l’a appliqué sous d’autres formes pour certains prestataires, le droit d’avoir des dons pour 100$ par mois.
Malgré toutes ces victoires, nous sommes encore loin du but, qui est de permettre de vivre dignement dans un pays riche.
La loi d’aide sociale a vraiment besoin d’être corrigée, améliorée. Mais attention, la première chose est de mettre fin aux catégories et donner une prestation juste pour tout le monde. On doit vraiment envisager au Québec un Revenu social universel garanti, pour tous et toutes.
Témoignage de Linda Laprise
Je viens vous partager une réalité que plusieurs d’entre nous vivons au quotidien. Le gouvernement dit vouloir aider les plus démunies. Non, je ne suis pas démunie. Je parle, je pense, j’agis. Je suis pauvre et je le vis à tous les jours. Je m’accepte dans ma pauvreté.
Les programmes d’aide à l’emploi sont en nombre insuffisant et ne permettent pas d’intégrer l’emploi à long terme. Les mesures, j’y crois plus. Je les ai toutes faites, j’ai passé par toutes les formes et aujourd’hui je me retrouve aussi pauvre qu’avant.
Je me souviens encore qu’à mes 55 ans, j’allais enfin pouvoir améliorer mon sort avec la contrainte temporaire, mais une nouvelle règle m’a obligée d’attendre 58 ans. Quelle déception ! Moi qui croyais à des jours meilleurs… mais non, encore une autre réforme !
Nous devons continuellement être à l’affût de l’ensemble des règles de la loi d’aide sociale. De réforme en réforme la loi s’est complexifiée. L’accès à l’information est de plus en plus difficile. Malgré l’information qui est donné par le ministère, souvent trop compliquée, beaucoup de personnes commettent sans savoir des erreurs qui leur coûtent cher. On doit subir leurs décisions. On a-tu le choix ?
Dans notre société, on serait censé être solidaires les uns les autres, mais l’entraide à l’aide sociale est pénalisée comme dans l’application injuste de la vie maritale.
Plusieurs sommes d’argent pourraient nous aider, mais au contraire, ces sommes retournent dans les coffres du ministère. Par exemple si on reçoit plus de 100$ par mois, encore aujourd’hui une partie de la pension alimentaire au bénéfice des enfants est détournée, les rentes versées par l’IVAC et Retraite Québec sont entièrement coupées sur le chèque. Le dépassement des gains de travail permis est imposé à 100%.
L’aide sociale n’a jamais suivi le coût de la vie, durant plusieurs années les chèques n’étaient pas indexés.
Sommes-nous si différents des autres? Comme pour l’interdiction de sortir du Québec pour plus de 7 jours.
En plus de subir des mesures discriminatoires et appauvrissantes, nous sommes largement victimes de préjugés. D’ailleurs c’est l’arme qui a été souvent utilisée par les ministres pour faire passer leurs réformes.
Extrait du Journal des débats de l’Assemblée nationale du 29 novembre 2019
M. Jean Boulet
M. Boulet : Merci, Mme la Présidente. Je sollicite l’appui et l’engagement de mes collègues parlementaires pour adopter la motion suivante :
«Que l’Assemblée nationale souligne qu’il y a 50 ans le gouvernement du Québec adoptait la Loi sur l’aide sociale afin d’introduire un droit à l’assistance sociale;
«Qu’elle reconnaisse l’importance de cette loi non seulement pour les personnes dans le besoin, mais pour l’ensemble de la société;
«Qu’elle s’assure de l’évolution de cette loi au fil du temps, de sorte que l’inclusion économique et la participation sociale des personnes et des familles à faible revenu se poursuivent.»
Mentionnons qu’en révisant la notion de «famille» la loi a notamment permis une avancée remarquable pour les mères monoparentales. Elles pouvaient enfin être considérées comme chefs de famille, peu importe leur statut, et avoir accès à l’aide qui leur était destinée.
Depuis son adoption, rappelons que la Loi sur l’aide sociale a été remplacée par plusieurs autres lois, d’abord la Loi sur la sécurité du revenu, puis la Loi sur le soutien du revenu et favorisant l’emploi et la solidarité sociale, et finalement celle qui est en vigueur aujourd’hui, la Loi sur l’aide aux personnes et aux familles.
En posant la prémisse que l’emploi est le meilleur moyen d’assurer la sécurité financière des personnes et des familles, la loi a été élaborée et bonifiée de manière à favoriser l’accès au marché du travail du plus grand nombre de personnes. Cet aspect de la Loi sur l’aide aux personnes et aux familles est particulièrement pertinent aujourd’hui, où le marché du travail a besoin de l’ensemble de ses travailleuses et travailleurs. À titre d’élus, nous avons le devoir de poursuivre les efforts visant à améliorer l’accompagnement et le soutien des personnes éloignées du marché du travail et qui vivent différentes problématiques.
Enfin, l’implantation du futur Programme de revenu de base pour les personnes qui ne peuvent travailler et qui ont des contraintes sévères est un exemple que le Québec continue d’avancer dans la bonne direction pour assurer la dignité des personnes les plus vulnérables de notre société. Et je saluerais les représentants du Collectif pour un Québec sans pauvreté qui sont avec nous ce matin. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le ministre. Maintenant, nous poursuivons le débat avec Mme la députée de Fabre.
Mme Monique Sauvé
Mme Sauvé : Merci, Mme la Présidente. La première Loi de l’aide sociale a été adoptée il y a 50 ans. Cette loi a démontré que l’État québécois s’imposait le devoir de garantir un revenu de base à tous.
C’est en 1961 que le gouvernement de Jean Lesage a mis sur pied un comité d’étude sur l’assistance publique, la commission Boucher, et c’est suite aux recommandations de cette commission que la Loi de l’aide sociale a été adoptée, nouvelle loi sur l’aide sociale qui établit le droit à l’assistance pour tout individu dans le besoin, quelle que soit la cause de sa situation. Vous me permettrez, Mme la Présidente, de rapporter des propos extrêmement justes de Claude Ryan : «Pour le Parti libéral, la liberté et l’épanouissement de l’individu demeurent la fin première de l’action politique.»
Vous savez, le Québec se distingue du reste des provinces canadiennes et des autres pays d’Amérique du Nord par son modèle social unique. Notre formation politique, au fil du temps, a d’ailleurs su se démarquer quant à ses actions pour rendre notre société plus juste et équitable. Je me dois de souligner le Plan d’action gouvernemental pour l’inclusion économique et la participation sociale 2017‑2023, qui constitue une réponse forte aux enjeux entourant la pauvreté. Alors, je salue encore aujourd’hui la grande initiative du précédent ministre de l’Emploi et de la Solidarité sociale, M. François Blais, pour cette grande réalisation. «Être libéral, a écrit Georges-Émile Lapalme, c’est être socialement juste. En d’autres mots, être libéral, c’est vouloir en même temps le progrès de l’individu et celui de la société.»
Mme la Présidente, en ce 50e anniversaire de l’aide sociale, avec beaucoup d’émotion, je pense à mes citoyens qui sont vulnérables, qui vivent des situations difficiles, tous ces citoyens du Québec. Et, bien que nous pouvons être très fiers du chemin parcouru depuis 50 ans, ne baissons jamais les bras devant le travail qu’il reste à faire pour une meilleure justice sociale. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Maintenant, nous allons entendre M. le député d’Hochelaga-Maisonneuve.
M. Alexandre Leduc
M. Leduc : Merci, Mme la Présidente. Il y a 50 ans, le gouvernement du Québec adoptait la Loi sur l’aide sociale. Cette loi introduisait un droit universel à l’assistance sociale. C’était une avancée majeure pour le Québec, pour les personnes.
Depuis 50 ans toutefois, les gouvernements se sont succédé, et des restrictions diverses ont bafoué ce droit au revenu. La couverture des besoins de base aux personnes assistées sociales n’a jamais véritablement été assurée. La logique du droit universel à l’assistance sociale est devenue une logique d’aide conditionnelle à la recherche d’emploi. On a passé du «welfare» au «workfare». L’objectif de la loi de garantir un revenu de base à tous n’a jamais été atteint.
En 2019, une personne assistée sociale vivant seule reçoit 644 $ par mois comme prestation de base. C’est 42 % du seuil de pauvreté. Avec les autres mesures fiscales d’aide au revenu, on monte à 776 $ par mois, ce qui couvre 51 % des besoins de base. Pourtant, l’article 3 de la loi mentionne : «L’aide sociale est accordée sur la base du déficit qui existe entre les besoins d’une famille ou d’une personne seule et les revenus dont elle dispose…» Depuis 50 ans, on ne comble pas ce déficit. Depuis 50 ans, on se contente de demi-mesures. On peut faire le choix pourtant, au Québec, d’abolir la pauvreté. On a assez de richesse, il faut simplement savoir la partager.
Il faut aussi arrêter de mettre des conditions à l’aide sociale qui restreignent la dignité des gens. La semaine dernière, ma collègue de Taschereau dénonçait les phénomènes des dettes à l’aide sociale liées aux dons que les prestataires doivent rembourser à même leurs prestations. Pénaliser l’entraide, c’est tout simplement improductif. C’est aussi injuste et inacceptable.
• (11 h 10) •
Même chose pour les mesures punitives qui visent à restreindre les séjours hors Québec pour les prestataires, une mesure qui touche principalement les femmes qui prennent soin des proches, des personnes qui veulent assister à des funérailles, prendre soin des membres de leur famille à l’étranger lorsqu’ils sont malades, etc. Une autre injustice, Mme la Présidente. Mettons-nous autant d’efforts à lutter contre l’évasion fiscale? J’en doute.
En terminant, je tiens à saluer les différents groupes… on a le collectif Québec sans pauvreté ici, mais plusieurs autres groupes qui travaillent sur l’enjeu de l’assistance sociale : le Front commun des personnes assistées sociales, l’ADDS, l’OPDS et des dizaines et des dizaines de groupes locaux et régionaux qui font de la bataille pour la défense des droits sociaux une priorité et qui s’assurent qu’on a une loi la plus équitable possible au Québec. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Alors, pour terminer ce débat, nous allons entendre M. le député de Rimouski.
M. Harold LeBel
M. LeBel : Merci, Mme la Présidente. Ça me fait plaisir d’intervenir sur ce sujet-là, puis je cherchais des choses, et je suis tombé sur le site du collectif sans pauvreté, et je suis tombé sur un article de René Lévesque, un article du Devoir de René Lévesque dans les années… en 1965 où il parlait de la prochaine loi sur la solidarité sociale. Il disait : «La politique de sécurité et d’assistance sociales ne doit pas être passive — empêcher les gens de crever de faim ne suffit pas — et la notion du droit à la satisfaction des besoins essentiels du citoyen et de sa famille, lorsqu’ils sont économiquement faibles, quelle que soit la cause immédiate ou éloignée de cette situation, doit remplacer le concept inadmissible de la « charité publique ».» C’est intéressant.
«Le ministre, qui n’assume ses nouvelles fonctions que depuis un mois et demi, est arrivé les bras chargés de nouvelles expériences, dans la main gauche un exemplaire du rapport Boucher produit par le Comité d’étude sur l’assistance publique, en 1963; dans la droite, cinq pages de notes écrites et un paquet de cigarettes qu’il a quasiment épuisé.
«[…]Cette politique, dit-il, doit être intégrée. Il faut la reformuler au plus tôt dans les textes et les règlements, moderniser, simplifier, humaniser et cesser aussi de considérer les prestations en argent comme l’élément le plus important de cette nouvelle politique : les services, santé, logement, crédit populaire, etc., ont au moins autant d’importance.» C’est spécial, en 1965. On en a échappé quelques-unes depuis ce temps-là.
«Cette politique doit être communautaire. L’État oriente, suggère, invente, contrôle les deniers, mais aller six fois à Québec chercher ses prestations, ou ses services, c’est aussi bête que s’il fallait, de Montréal ou Mont-Laurier, aller y acheter ses épiceries. Le programme doit être décentralisé — décentralisé — et tirer profit au maximum des ressources humaines régionales, communautaires, locales.
«[…]La loi d’assistance qui vient compléter l’apport des allocations doit être « intégrée », tenir compte des exigences budgétaires de la famille économiquement faible, abolir la plupart des catégories d’assistance — on n’en a pas aboli, on en a créé plusieurs depuis plusieurs années — en somme répondre davantage aux besoins qu’à la nature des handicaps.
«[…]Au premier titre, les services de santé, d’où la mise en vigueur, le plus tôt possible, de l’assurance santé; d’où l’étroite collaboration requise entre le ministère de M. Lévesque et celui de M. Kierans.
«Rien ne sert en effet de verser des prestations si le récipiendaire ne peut que choisir entre manger et payer les comptes [de] médecin.» Ça ne vous rappelle pas des choses qui existent encore aujourd’hui?
«Pour ce qui est du ministère de la Famille même, il doit assurer notamment, et c’est urgent, l’aide aux familles, orientation du budget, organismes coopératifs [et] crédit [communautaire], etc.
«[…]Un autre service social capital : l’habitation.» J’entendais le député de Jean-Lesage parler de la crise du logement à Québec. On en parlait déjà à l’époque. Qu’est-ce qu’on a échappé? Qu’est-ce qu’on n’a pas fait? «D’une part, il y a la rénovation urbaine, mais plus encore le logement lui-même, où le devoir de l’État, souligne M. Lévesque, ne se trouve que dans une perspective purement sociale : priorité aux familles économiquement faibles, aux couples et individus âgés, logis subventionnés.
« »Seule, une telle perspective peut justifier d’ailleurs que nous envisagions d’y dépenser des fonds publics », souligne le ministre. À défaut d’une telle politique, l’assistance sociale actuelle se trouve à subventionner littéralement les exploiteurs propriétaires de taudis.
«Enfin, M. Lévesque a souligné la nécessité d’étendre à toutes les régions, et non seulement les centres urbains, l’assistance judiciaire, qui relève naturellement de la Justice et du Barreau.»
Humaniser, dignité, allocations puis accompagner les gens qui ont des allocations. Objectif : sortir les gens de la pauvreté. C’était ça, le fondement. Et aujourd’hui la pauvreté est encore là et a différents visages. La pauvreté a différents visages. Ce que j’espère, c’est que… Quand je lis ça, c’était un grand chantier qu’on ouvrait pour changer les choses, donner de l’air. Il me semble qu’on est capables encore de se donner ça, comme parlementaires, se donner ce goût d’initiatives, ce goût de changer les…
La Vice-Présidente (Mme Soucy) : En conclusion, M. le député.
M. LeBel : …changer les choses, et je pense que le revenu de base garanti pour les gens, ce serait une belle chose à faire, et on pourrait le faire… Les gens du collectif en haut, continuez à bousculer, continuez à proposer des choses. Et, si on est capables de soutenir ces initiatives-là, je pense qu’on est capables d’aller beaucoup plus loin. Merci.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Alors, cette motion est-elle adoptée?
Des voix : Adopté.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Alors, motion adoptée.